Deux guitaristes aux styles opposés se sont produits le samedi 17 janvier à 18h à l'Institut Emmanuel d'Alzon.
Le sévillan Rafael Rodriguez "El Cabeza" est un accompagnateur très demandé par les artistes, aussi bien chanteurs que danseurs. Depuis quelques années, il est le guitariste attitré de nombreux cantaores, toutes générations confondues, allant d'El Cabrero à David Palomar, qui apprécient son écoute, la sensibilité de son jeu, son expérience mais aussi son enthousiasme toujours présent dans l'accompagnement du cante. En revanche le tocaor ne se produit pratiquement jamais en solo. La seule fois où nous avons eu l'occasion de l'écouter dans ce contexte était il y a cinq ans au même festival flamenco de Nîmes, en première partie du récital d'El Cabrero.
C'est un moment rare que nous a offert le festival flamenco de Nîmes le 17 janvier à l'Institut Emmanuel d'Alzon, un privilège de pouvoir écouter Rafael Rodriguez en solo. Ses compagnons musiciens et chanteurs du spectacle "Los Invitados" de Belen Maya ne s'y sont pas trompés, ils sont tous venus l'écouter, et les olé, asa, a vaya et autres jaleos se font entendre depuis le fond de la salle.
Rafael débute par une malagueña qu'il avait composée en 2008 pour Rocio Molina, pour le spectacle Oro Viejo semble-t-il. Une très jolie pièce qui donne le ton du récital et transmet déjà au public une bonne dose d'émotion. Il poursuit plus légèrement par une swinguante guajira très originale qui suscite l'enthousiasme des spectateurs, avant de poursuivre por siguiriya après quelques traits d'humour sur le titre "Tu luz", le morceau ayant été composé dans la ville rose. La zambra qui suit, dédiée à son père et aux compagnons présents dans la salle, est a priori la même qu'en 2010. Ses sonorités orientales emmènent le public dans un palais de Grenade aux senteurs d'azahar. Enfin, Rafael innove avec une rondeña fraichement composée qu'il dédicace cette fois à sa femme Isabel. L'influence de Niño Ricardo est toujours bien présente dans le jeu de Rafael qui transmet toujours avec plaisir sa joie de jouer. Un récital à retenir comme l'un des plus jolis moments des 25 ans du festival.
Celui qui succède à Rafael Rodriguez est un pur technicien de la guitare flamenca. Sévillan également, Manolo Franco, qui avait déjà joué dans un mano à mano avec Niño de Pura il y a quelques années dans un autre festival de flamenco français, a un style plus classique et plus fluide que celui de Rodriguez. Il n'éprouve pas la nécessité de parler avec le public, car son outil de communication, c'est sa musique, qu'il a fort belle. Manolo offre dans la granaina d'introduction de son concert un véritable festival de tremolos et picados, puis enchaîne par des variations sur le garrotin avant de poursuivre par une superbe solea et de conclure por guajira. A noter que le tocaor a choisi deux palos d'ida y vuelta. Toujours des olé, asa et a vaya depuis le fond de salle, mais le public semble toutefois moins réceptif que durant la première partie du récital.
En résumé un très beau début de soirée avant d'aller écouter El Pele au Théâtre Bernadette Lafont.