"El Mirar de la maja" de Sara Calero est l'une des plus jolies propositions du Festival de Jerez cette année. Même si l'artiste a une solide formation et est déjà connue dans le milieu de la danse espagnole et du flamenco, on ne s'avancera pas trop en affirmant qu'elle est incontestablement la révélation du XVIIIème Festival de Jerez.
La danseuse Sara Calero, qui domine tous les rouages de la danse espagnole et du flamenco, a mis son art au service d'une oeuvre splendide qu'elle partage avec Gema Caballero, Fernando de la Rua et Pablo Romero Luis.
"El Mirar de Maja" fait référence à l'une des pièces musicales de l'oeuvre du grand pianiste et compositeur espagnol Enrique Granados. Inspirée également par les images féminines goyesques, la création s'attache à en restituer à la fois les mouvements, les poses et les couleurs.
Telle une chrysalide, Sara Calero apparaît au début du spectacle sous un film plastique et un chant d'opéra puis se dévoile peu à peu pour donner vie à des images qui apparaissent subtilement sur une toile verticale transparente située à gauche de la scène. La danse saccadée de la danseuse reproduit ces images qui, projetées les unes à la suite des autres, décomposent les mouvements de la danse. L'accompagnement musical - duo de guitares classique et flamenco - est d'une grande beauté. Sara Calero se fond dans la peinture goyesque en dansant avec des cymbalettes derrière la toile alors qu'au premier plan apparait Gema Caballero. Il faut souligner la performance de la chanteuse de Grenade, déjà très remarquée dans le spectacle "Los invitados" de Belen Maya, qui réalise dans la solea qui suit un exercice extrêmement périlleux en alternant dans son cante des vers récités et chantés, qui démontre sa grande maîtrise du phrasé, une véritable prouesse. Suivent caña avec castagnettes, et d'autres superbes pièces qui mettent en valeur le style unique et le savoir-faire de Sara Calero, qui se retrouve ensuite au balcon de la sala compañia pour une séquence humoristique durant laquelle elle chante, et enfin, redescendue sur scène dans une tenue de couleur chair, pot de peinture à la main, elle se transforme elle-même en une véritable maja goyesque.
La danseuse de Madrid qui était aussi présente dans le spectacle Fatum de Javier Latorre où elle tenait le rôle de Leonor, offre ainsi une originale et splendide démonstration de ce patrimoine ibérique souvent oublié à tort, la danse espagnole, mais aussi de flamenco. Un merveilleux spectacle et une leçon de bon goût à tout point de vue : scénographie, costumes, musique, danse, chant... un joyau.