Isabel Bayon, qui a reçu le 20 novembre 2013 le prestigieux "Premio Nacional de Danza" en Espagne, est aussi la lauréate du prix de la critique du Festival de Jerez pour "Caprichos del tiempo". Un spectacle dont nous avions dû occulter la première l'an dernier au Festival de Jerez car il avait lieu au même moment que le récital d'Agujetas et de son fils à Rota. En ayant entendu dire tant de bien, nous en attendions beaucoup.
Isabel Bayon est une remarquable danseuse qui a été bercée depuis la plus tendre enfance par le son des catagnettes de l'école Sévillane. Sa robe de princesse, c'était une bata de cola. Cette nostalgie l'a peut-être conduite à sa nouvelle création "Caprichos del tiempo" - Les caprices du temps.
De nouveau un spectacle sur le thème du temps qui passe, et sur ce qui reste du flamenco d'antan, son intemporalité. Isabel Bayon ne perd rien de ses racines, des bases de l'école Sévillane qu'elle a apprises auprès de Matilde Coral, mais elle ose aussi s'éloigner de la tradition avec une farruca particulièrement originale sur la musique de Sabicas. Sa danse est fluide et légère, précise, très connectée à la musique. Elle ne quittera la scène qu'une seule fois au cours de la représentation.
Un très beau spectacle auquel il semblait pourtant manquer quelque chose, mais l'on ne saurait dire quoi. Peut-être une cohésion dans le groupe de musiciens qui ne semblait pas si à l'aise. Peut-être aussi un manque d'originalité dans les remates de la danseuse - bras en l'air et main ouverte - qui pouvait rendre certains passages monotones.
Au final une création sobre, sans artifices, sans mise en scène démesurée, avec un éclairage intimiste. Pour compenser le petit budget alloué à la création du spectacle, Isabel avait en effet décidé de faire une proposition minimaliste pour le Festival de Jerez. La musique est faite maison, par son mari le guitariste Jesus Torres, et elle porte la même robe pendant la plus grande partie de la soirée. Au fil des bailes elle rend hommage aux maestros qui pour la plupart ne sont plus parmi nous, à Mario Maya par exemple, en dansant assise sur une chaise.
Des marquages sonores qui rappellent le tic-tac d'une horloge que l'on entendait déjà au début de spectacle reviennent hanter le spectateur. Le temps continue de filer, mais le flamenco lui, est toujours là. Et le public aussi, qui réserve une ovation à la danseuse après l'alegria finale.