Dorantes avait la responsabilité d'ouvrir les festivités flamencas dans la salle Charlie Parker de la Grande Halle de la Villette, et il n'était pas venu seul ; à ses côtés, des artistes de talent comme Yelsy Heredia à la contrebasse - même si on aurait préféré la sonorité moins jazzy de celle de Renaud Garcia-Fons -, Tete Peña aux percussions, et la superbe bailaora gaditane Rosario Toledo au baile.
David Peña "Dorantes" appartient à une grande dynastie flamenca. Mais en tant que musicien, il est surtout connu pour avoir composé un chef-d'oeuvre musical, le fabuleux "Orobroy". Rien que pour écouter cette composition en direct, cela valait le coup de se déplacer jusqu'à la Porte de Pantin. On dit souvent que le duende surgit rarement et lorsqu'on ne l'attend pas, mais dans cette musique de Dorantes, il y est en permanence ; il est au rendez-vous dès les premières notes de la mélodie cristalline, et ce jusqu'à la dernière. L'inconvénient, c'est que les autres créations du pianiste peuvent parfois paraître fades à côté d'une telle oeuvre d'art, qui plus est lorsque ces morceaux dévient vers le jazz. C'est sans doute ce qui s'est passé durant le concert ce soir-là. Tout le monde attendait, plus ou moins consciemment, THE buleria - à laquelle il manquait toutefois les voix remplacées par une mélodie jouée au piano - et le reste du concert a moins enthousiasmé le public.
Pourtant, il y eut d'autres bons moments durant cette première partie de soirée, notamment les délicieuses interventions d'une Rosario Toledo bien en phase avec les instruments percussifs, qui ajoutèrent un grain de folie au sein de ce cuadro un peu trop sage. Le baile de la gaditane a en effet beaucoup changé depuis sa prestation à Mont-de-Marsan en 2009, et Rosario souhaite semble-t-il poursuivre dans cette voie plus contemporaine.
Dorantes se produira le vendredi 8 juillet au Café Cantante de Mont-de-Marsan sur la place Saint-Roch pour une "Piano flamenco session" dédiée à l'improvisation. On attend cette fois l'interprétation avec la cantaora Esperanza Fernandez de "Di, Di, Ana", autre très beau morceau jadis composé par son père Pedro Peña, qui l'interprétait avec le regretté guitariste Pedro Bacan.