L'interview de la semaine 

MANUEL GUTIERREZ

Dans le cadre du IIIème Festival Flamenco de Paris, le jeune bailaor MANUEL GUTIERREZ donnait des stages de flamenco intensifs dans la journée. Le dimanche 11 Mars, je me rendis donc sur place, dans les profondeurs du Rex, pour voir sa façon de travailler et faire son interview. En discutant avec les stagiaires, je me rendis compte que certains avaient fait le déplacement depuis Lyon, Nantes ou même Grenoble pour suivre le stage. Pendant son stage, Manuel est très concentré et parle peu, même pour le niveau débutants, le travail est intensif. Son cours est structuré et commence systématiquement par des étirements. Vient ensuite l'échauffement des pieds (punta-tacon, redoble, puntera, technique d'en haut ou mix des deux selon les niveaux), et enfin le travail chorégraphique. Manuel était accompagné par le percussioniste IMAD au cajon et les avancés eurent la chance de bénéficier en plus du cante de MENCHO lors de la chorégraphie. Les stagiaires travaillèrent sur les palos suivants : solea (débutants), alegria, et buleria de cadiz (intermédiaires/avancés). Manuel me propose de répondre à mes questions après le stage, nous ressortons donc des entrailles du Rex et croisons Anatole, un jeune garçon qui apprend la guitare flamenca et joue déjà très bien et nous arrêtons quelques instants pour l'écouter, puis nous nous installons au premier étage pour réaliser l'interview.


Manuel, tu as travaillé sur "El Romancero Gitano", mais le public parisien t'a réellement découvert l'an dernier lors du 2ème Festival Flamenco de Paris au Cirque d'Hiver avec Chispa Negra. Comment et quand as-tu intégré Chispa Negra ?

J'ai intégré Chispa Negra il y a 3 ans : comme l'ancien danseur, Pedro Cordoba, ne pouvait plus continuer, ils m'ont contacté et c'est comme celà que j'ai commencé à travailler avec eux.

Tu danses deux soirs et parallèlement tu enchaînes six heures de stage par jour, comment entretiens-tu ta condition physique pour tenir ce rythme effréné ?

Je me couche tôt, je me concentre beaucoup. J'ai commencé il y a peu à faire du vélo et de la course à pied pour la respiration, et également de la natation. En fait c'est mon métier qui me maintient, là par exemple je suis malade depuis une semaine mais je tiens parce que ça me plaît.

Donnes-tu également des cours ou stages en dehors du festival ?

Oui, un peu partout lors des tournées : en Europe, aux Etats-Unis...

Quelle est ta méthode d'enseignement ?

Je fais des échauffements, je travaille plein de petits pas qui vont servir pour la chorégraphie, j'aime faire des choses simples mais efficaces, pour que les élèves repartent chez eux avec quelquechose de solide, qu'ils ont compris et dont ils pourront se resservir.

D'ou te viens ton aficion pour le flamenco ?

J'ai baigné dedans depuis tout petit ! Mon père avait une peña et s'occupait d'une émission de radio sur le flamenco. Mes soeurs dansaient aussi...

Pourquoi avoir choisi le baile, avec qui t'es-tu formé et à quel âge ?

J'ai commencé dès que je me suis mis à marcher ! En fait ça s'est fait naturellement, mes parents avaient même déjà acheté une panoplie de danseur avant que je naisse. Je me suis formé auprès de grands maîtres comme JOSE GALVAN, JAVIER LATORRE et JOAQUIN GRILO. Mon baile s'inspire de ceux de FARRUCO et d'ANTONIO CANALES. Dans le flamenco j'aime aussi beaucoup les percussions (je joue du cajon) et le chant, j'aurais aimé chanter !

On t'a vu dans des registres très différents : celà va des cuatro cantaores gitanos à flamencoriental en passant par Chispa Negra : comment te positionnes-tu dans le flamenco français, plutôt moderne ou traditionnel ?

Je me considère comme un danseur actuel, qui utilise beaucoup les techniques de pieds.

As-tu une préférence pour certains palos ?

Oui, la siguiriya et la solea sont ceux que je préfère.

On te voit beaucoup prier avant d'entrer en scène, es-tu croyant ?

Oui, je suis croyant et supersticieux. Lorsque je prie, je pense à ma famille, c'est ça qui me donne la force de danser, et si j'oublie de le faire, je ne suis pas bien, c'est devenu une obligation.

Comment gères-tu la situation quand par exemple ton lacet se défait pendant le baile ?

Cela est arrivé le 11 Juin lors du spectacle "Los Cuatro Cantaores Gitanos" à Planète Andalucia.

Je fais comme si de rien n'était, je continue à danser et j'essaye d'être discret au moment de le refaire.

Tu vis entre Montpellier et Cordoue : quelles relations as-tu avec les flamencos de là-bas ?

J'ai de très bonnes relations, j'ai vécu cinq ans à Cordoue et j'y ai plein d'amis musiciens.

Que penses-tu de la candidature de Cordoue comme capitale européenne de la culture en 2016 ?

Je suis très content car celà va faire bouger la ville et il va y avoir plus de spectacles de flamenco !

Quels sont tes projets ?

Je vais partir en tournée aux Etats-Unis avec Juan Carmona en Avril et sinon je vais continuer à tourner avec Chispa Negra et Duquende. Pour l'instant j'accompagne principalement les artistes, mais j'aimerais d'ici un an ou deux monter un spectacle à mon nom. Mais je ne suis pas pressé, je veux continuer à apprendre !


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flamenco-culture.com - Murielle Timsit - Le 11/03/2007