L'interview de la semaine 

Miguel Poveda : Ange et Poète 

 

Nîmes, 25 Janvier 2008. Il est plus de 19h lorsque je retrouve Miguel POVEDA dans sa loge. Il m'accueille chaleureusement avec un grand sourire qui me remplit de joie, la même joie que j'éprouve lorsque je l'écoute chanter. Nous commençons rapidement l'entretien en présence de sa manager.


Miguel tu es catalan, quel est ton premier souvenir du flamenco ?

Mon premier souvenir du flamenco ? eh bien c'est celui de la maison, lorsque ma mère écoutait la radio ou mettait des disques à la maison... Je me souviens aussi que ma mère nous emmenait à la peña culturelle andalouse qu'il y avait en Catalogne, et ensuite les gens chantaient et dansaient. Ce sont mes premiers souvenirs.

Comment as-tu appris à chanter ?

C'est difficile à expliquer. Je crois qu'on apprend avec le temps à s'améliorer et à créer sa propre personnalité et son propre language. Mais je pense qu'il faut naître avec un minimum de qualités, non ? Je crois que je me suis amélioré avec le temps, avec le travail aussi. C'est un art tellement compliqué et si grand qu'on en est encore au début, il y a beaucoup à apprendre.

Qui sont tes réferences ?

Camaron DE LA ISLA bien sûr, c'est une référence pour tout aficionado...L'oeuvre d'Antonio MAIRENA, La Niña DE LOS PEINES, Enrique MORENTE, Carmen LINARES, Luis EL ZAMBO...et beaucoup d'autres.

As-tu un palo préféré ?

Tous, je ne pourrai pas en choisir un, car dans chacun il y a une musique distincte, un rythme distinct, des sonorités différentes...dans chaque palo il y a un monde magique.

Qu'as-tu ressenti lorsque tu as gagné quatre prix au Festival de la Union ?

J'étais très jeune, j'avais vingt ans, je commençais presque. Ce fut quelque chose que je n'attendais pas si tôt. Le Festival de la Union a été un très grand tournant dans ma carrière. Même si ça faisait cinq ans que je chantais, c'est en 1993 avec le Festival de la Union que tout a commencé.

"Dans chaque palo
il y a un monde magique"
 

D'ou te vient ton inspiration lorsque tu chantes ?

Je ne sais pas...de la vie, des gens, de la famille, des amis, du son de la guitare, de la musique du piano (je joue du piano), des palmas, du fait que les spectateurs dans la salle soient réceptifs et te motivent, il y a beaucoup d'éléments.

As-tu peur de monter sur scène ?

Non, je n'ai pas peur. Ca me procure un sentiment de respect et ça me donne une certaine responsabilité, mais la peur non.

Tu travailles souvent avec Chicuelo, comment est née votre collaboration ?

Je l'ai connu car il jouait à Barcelone avec tous les artistes de là-bas. Avec LA TANI, DUQUENDE, Maite MARTIN. J'ai commencé à travailler avec lui car j'aimais beaucoup la façon dont il jouait, et peu à peu on a travaillé de plus en plus souvent ensemble jusqu'à ce qu'il devienne mon guitariste le plus régulier.

Tu t'étais un peu éloigné du flamenco avec ton album "Desglac", souhaites-tu faire de nouveau quelque chose qui n'est pas flamenco ?

C'est un disque différent du flamenco car c'est un album où il y a des poèmes en catalan d'auteurs catalans contemporains et du siècle dernier, de poètes valenciens, mallorquins, mais tout en langue catalane, qui est ma seconde langue. La sonorité de cet album n'est basée sur aucun palo de flamenco mais sur des chansons. La seule sonorité de flamenco est peut-être ma voix non ? on ne peut pas le nier. Ce n'est pas une question de s'éloigner du flamenco, je ne veux pas m'éloigner du flamenco car je suis cantaor, je fais ce que j'ai à faire. C'est le moyen de réaliser d'autres oeuvres, d'autres projets qui pour moi peuvent être intéressants, et d'apprendre plus.

Tu as participé à plusieurs films comme par exemple "Fado" de Carlos SAURA, que t'ont apporté ces expériences ?

Le premier film fût "La Teta y la Luna" avec Bigas LUNA dans lequel j'étais à la fois acteur et chanteur, en 1994. Et pour les fims suivants ce furent plutôt des collaborations musicales. C'est le cas de "Fado" avec Carlos SAURA dans lequel j'ai chanté un thème avec MARISA. Ce fût une très bonne expérience de rentrer dans le monde de Carlos SAURA qui me plaisait déjà beaucoup comme spectateur, entrer dans le monde de Carlos SAURA est une expérience à part entière. De plus ça m'a permis de chanter du fado, ce que je n'avais jamais encore fait. Et j'ai aussi tourné un film avec Nicolas KLOTZ, un réalisateur français, ça s'appelle "La question humaine", mais je ne l'ai pas encore vu !

Comment vois-tu la relation entre le flamenco et le cinéma ?

Il y a dans tous les films un élément commun, c'est la musique. Parfois c'est du flamenco, d'autres fois du jazz, ou encore des grands orchestres que les réalisateurs choisissent pour leurs oeuvres. Si tu penses à une oeuvre sur le flamenco, elle n'existe pas encore. Le seul qui ait fait un film sur le flamenco c'est Carlos SAURA et il a eu un très bon résultat. Tout ce qui met en avant le flamenco donne de bons résultats, que ce soit au cinéma ou au théâtre.

"Le Festival de la Union
a été un grand tournant
dans ma carrière"
 

Tu as travaillé sur un projet concernant la "Generacion del 27" et il y a beaucoup de liens avec la poésie dans ton travail, que représente pour toi la poésie ?

C'est un peu découvrir une autre façon de raconter des histoires comme seuls les poètes savent le faire. Il y a beaucoup de poésie populaire dans le flamenco, une poésie du peuple, très simple.
Et puis quand il y a eu une période de décadence au niveau des letras dans le flamenco, ça m'a aidé de pouvoir m'appuyer sur le travail des poètes et ça m'a permis de découvrir un monde fascinant avec lequel on peut s'exprimer aussi et le mettre en musique.

Que signifie ta présence à Nîmes ce soir ?

C'est une grande responsabilité. Venir à Nîmes c'est comme chanter à Séville ou à Madrid. C'est une ville qui reçoit depuis de très nombreuses années de grands artistes de flamenco, il y a ici une aficion très importante et de très bons artistes de flamenco français aussi, la critique est très exigeante, alors quand j'arrive ici, je sais qu'il faut que je sois à la hauteur.

Quels sont tes projets pour l'année 2008 ?

J'en ai beaucoup. Je vais peut-être sortir un disque issu d'un concert que j'ai fait avec CHICUELO au Festival de Perelada avec un orchestre symphonique. J'aimerais aussi enregistrer un album de coplas fin 2008. Et j'ai également plusieurs projets en phase de création, j'ai du travail !

Remerciements à Miguel POVEDA, MARIA, Houria MARGUERITE, Antoine CHOSSON

Questions, réalisation, traduction, montage : Murielle TIMSIT

ENTRETIEN PROTEGE NE POUVANT ETRE DIFFUSE NI EN INTEGRALITE NI EN PARTIE SANS DEMANDE D'AUTORISATION EFFECTUEE AU PREALABLE AU SITE WWW.FLAMENCO-CULTURE.COM.- COPYRIGHT SUR LES QUESTIONS ET LES REPONSES DES FICHIERS SOURCES AUDIO, VIDEO et ECRITS.

flamenco-culture.com - Le 25/01/2008