La Noche Blanca Del Flamenco 

LA NOCHE BLANCA DEL FLAMENCO 

Cordoue flamenca jusqu'au bout de la nuit 


Cordoue Capitale Européenne de la Culture en 2016. Avec le flamenco comme fer de lance. Après L'année du flamenco en 2006, la ville des idées instaure un nouveau rendez-vous pour les aficionados, qui s'ajoute au celèbre Concours triennal et au Festival International de Guitare : La Noche Blanca del Flamenco. Une nuit complète de spectacles de flamenco gratuits répartis dans des endroits stratégiques de la ville : le Théâtre de l'Axerquia, plus connu sous le nom de Gran Teatro, la célèbre Plaza de las Tendillas, ou encore l'immense Plaza de la Corredera, la peña flamenca Rincon del Cante, mais aussi l'Alcazar de Los Reyes Cristianos dans le quartier historique de la ville, le musée Julio Romero de Torres... aucun site n'est oublié. La date est judicieusement choisie : le 21 Juin, jour de l'été et de la fête de la Musique.

Quant aux artistes, ils sont en large majorité cordouans : EL PELE, MERENGUE DE CORDOBA, Fran ESPINOSA, NIÑO SEVE, Paco SERRANO, CHURUMBAQUE Padre et Hijo, JUANMA EL TOMATE, Olga PERICET...

Rien n'a été laissé au hasard : pour que les touristes s'y retrouvent l'Office du Tourisme a réalisé un dépliant spécial Noche Blanca avec la liste de toutes les manifestations réparties géographiquement sur une carte. Cordoue était flamenca, de 22h à 7h du matin.

L'événement eût son lot de problèmes techniques : un Miguel POVEDA qui n'avait pas de retour, un changement de lieu à la dernière minute pour l'enfant du pays Fran ESPINOSA... Et une programmation générant la frustration de ne pas pouvoir voir toutes les têtes d'affiches disséminées aux quatre coins de la ville. Il fallait faire un choix entre l'ambiance feutrée du Gran Teatro et celle explosive de la Plaza de la Corredera. Il fallait choisir entre FOSFORITO et CIGALA, GALVAN et ESPINOSA...un choix difficile s'il en est, et surtout un vrai dilemme.

Une affiche finalement assez masculine pour cette première nuit. C'est une Plaza de Las Tendillas bien remplie qui accueille le premier concert, celui de Manolo SANLUCAR qui nous avait laissé un étrange souvenir à Jerez. Mais ce soir-là, parfaite communion avec ses musiciens. Le virtuose entame le récital par sa fameuse Maestranza, puis s'offre une buleria et une rumba entraînante accompagnée par l'excellent cante de Carmen GRILO. Vient ensuite celui que tout le monde attend : Miguel POVEDA. Alegrias, malagueña, le badalonais offre son répertoire habituel de letras antiguas, accompagné par Chicuelo et ses deux fidèles palmeros Luis CANTAROTE et carlos GRILO, et c'est comme toujours un vif succès. Cependant, la place se dépeuple avant l'arrivée d'Israel GALVAN, le public peut-être un peu frileux vis-à-vis de l'art avant-gardiste du sévillan, et préférant sans doute retrouver un autre cantaor Cordouan, EL PELE.

Je fis pour ma part le choix d'aller voir danser notre ami Fran ESPINOSA qui se produisait dans les Pisos de la Sagrada Familia avec sa formation habituelle. Le jeune danseur, récemment papa et dont c'était également l'anniversaire ce jour-là impressiona les aficionados. Je remarquai que d'autres avaient préféré l'ambiance familiale de ce concert de quartier à la foule de Las tendillas, comme le chanteur SENECA et des membres de la peña Rincon del cante. Fran dansa por bulerias et cantiñas, accompagné par EVA DE DIOS au cante et Alberto LUCENA à la guitare, les palmas de FARINA...une équipe 100% cordobesa ! Même si, comme dit Andrés MARIN "Les comparaisons ne sont pas bonnes", on ne peut s'empêcher de retrouver dans le baile de Fran des références à FARRUCO el Viejo.

Malgré le souhait initial de me rendre au théâtre de l'Axerquia pour voir FOSFORITO, Paco CEPERO, LUIS DE CORDOBA et Olga PERICET, je décidai finalement de rejoindre une place de la Corredera noire de monde pour écouter le cante gitan de LA TANA, Montsé CORTES, JOSÉ EL FRANCES et Diego EL CIGALA. JOSÉ EL FRANCES (cousin et sosie de Mencho), tel un Patrick Bruel flamenco mit une ambiance fabuleuse en faisant chanter le public. Le dernier artiste à se produire fût celui que tout le monde attendait, EL CIGALA. Malgré un "Viva Cordoba !" lors de son entrée sur scène, il ne réussit pas vraiment à enthousiasmer le public, peut-être lassé d'avoir tant attendu. De plus, alors qu'il s'agissait d'un hommage à CAMARON DE LA ISLA, le madrilène puisa essentiellement dans son répertoire personnel ce soir-là, notamment avec des titres de son album Picasso en mis ojos.

Il doit être environ 4h du matin lors de l'arrivée à la peña Rincon Del Cante. Et là, c'est la cerise sur le gâteau. Le guitariste Niño Seve se produit sous nos yeux, et l'ambiance flamenca se poursuit bien au delà du récital. Après les churros con chocolate préparés exceptionnellement par les socios (membres) à cette occasion, lorsque je quitte la peña vers 7h du matin il fait déjà jour, mais c'est un dimanche matin inhabituel. Pour moi la Noche Blanca se termine comme elle avait commencé, avec Manolo SANLUCAR que je rencontre fortuitement à la gare. La noche est bouclée.

Gageons que La Noche Blanca Del Flamenco, offrant des spectacles gratuits mettant en scène en majorité des artistes locaux, mais aussi de grandes figures du flamenco réussira le pari de devenir un grand rendez-vous annuel du flamenco, et les nouvelles infrastructures comme l'aéroport international de Cordoue qui est actuellement en construction devraient faciliter l'objectif que s'est fixé la ville de Cordoue. Cet objectif sous-jascent, ambitieux, au delà de faire de Cordoue la capitale européenne de la Culture en 2016, est aussi que Cordoue devienne la capitale européenne du flamenco; notamment en y domiciliant le futur prestigieux Concours de La Llave de Oro del flamenco (qui remplacera la llave de oro du cante). Cordoue, parent pauvre du flamenco, car situé à la frontière du flamenco de tradition, comme nous l'expliquait récemment le directeur cordouan du Festival de Jerez Francisco LOPEZ, souhaite cependant relever le défi, et ce défi est en bonne voie de réalisation. Une Casa Del Flamenco-Museo Fosforito sur le point d'être ouverte au public, la compagnie de Javier LATORRE en résidence au Gran Teatro...De nouvelles écoles de danse en projet... Malgré le pessimisme de certains artistes locaux, il semble que le flamenco ait encore de beaux jours devant lui à Cordoue.


Remerciement spécial à Fran Espinosa pour sa bonne humeur et sa profonde gentillesse et au photographe de flamenco Toni Blanco qui nous fait l'honneur de publier ses magnifiques photos pour illustrer ce reportage.

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Flamenco-Culture.com - Murielle TIMSIT - Le 22/06/2008