L'interview de la semaine 

 

ARBOLS S'ENRACINE DANS LE PAYSAGE DU FLAMENCO-FUSION 

Le Vendredi 2 Mars 2007 le percussioniste (tablas, darbouka et cajon) LAURENT GHENIN présentait au public de PLANETE ANDALUCIA "LA DANSE DU PAPILLON", une véritable rencontre entre le flamenco et ses racines, avec la formation ARBOLS, composée de la chanteuse CATALINA GIMENEZ, du guitariste GONZALO ALMARAZ, du flutiste bansouri GUILLAUME BARRAUD et de l'accordéoniste IVIZA BOGDANIC, sans oublier la talentueuse AURELIA VIDAL à la danse. Tous les ingrédients étaient réunis pour faire de cette soirée un succès : le génie des percussions, l'envoutement de la musique et du chant, la puissance et la grâce de la danse, la complicité entre les artistes et le dialogue avec le public...musiques tsigane et indienne savamment mixées avec un soupçon de flamenco. A voir absolument ! Ci-dessous les propos recueillis auprès des artistes.


1. Laurent, comment t'es venue l'idée de mêler musique indienne et tsigane au flamenco ?

L'idée m'est venue par passion pour les musiques gitanes, la musique indienne, la rythmique riche et la poésie de ces musiques issues d'un berceau allant de la Méditerranée à l'Inde, issu des troubadours anciens, amoureux de la liberté du voyage. On y distingue des échelles de notes, une approche du rythme et des cycles communs. Evoluant dans ces musiques comme percussioniste depuis longtemps, j'ai choisi de composer et de mettre en musique mes textes pour cette fusion. Nous avons arranger les morceaux en groupe. Aimant la danse, j'ai choisi la chaleur et la dynamique de la danse flamenco pour narrer cette « danse du papillon », symbole de beauté, témoin de la nature subtile, puissante et fragile à la fois. La technique de pieds de la danse flamenco étant proche de celle de la danse kathak de l'Inde, (dont les origines seraient commnunes), « les bols » (onomatopées) du tabla indien se prêtent idéalement à l'excécution de la danse flamenco.

2. Pourquoi avoir fait appel à Catalina et Gonzalo pour "Arbols" ?

Catalina et Gonzalo sont deux artistes qui ne font pas de compromis avec leur art tout en restant ouverts. Ils sont conscients que l'art traditionnel ne peut perdurer qu'en intégrant et s'enrichissant d'autres influences. Puisant dans leur savoir traditionnel et leur longue expérience, ils me l'ont fait partager généreusement et enrichi ma musique. Musiciens sensibles en osmose, j'ai été touché par l'âme de leur son ainsi que les jeux expressifs du flutiste bansouri guillaume Barraud et de l'accordéoniste Ivitsa Bogdanic.

3. Catalina et Gonzalo vous avez beaucoup travaillé avec Laurent pour monter ce projet de flamenco-fusion : quelles différences et difficultés avez-vous rencontrées par rapport au flamenco traditionnel ?

Tu sais, en règle générale, le contenu des letras flamencas reste dans l'ensemble un vocabulaire simple proche des dictons et des proverbes ou l'écriture est tout sauf intellectuelle et c'est ce qui fait la force du chant flamenco où la valeur expressive et le rythme priment avant l'écriture. Pour Arbols, ce n'était pas le propos. J'ai écouté l'ambiance musicale du projet de Laurent Ghénin et je me suis dit qu'il n'était pas question de chanter de la façon flamenca, que là n'était pas le propos et qu'au niveau du phrasé, il fallait que je tente autre chose. L'ambiance étant indienne, orientale et des pays de l'est, je suis partie ailleurs, dans un autre délire, une autre histoire et la voix à suivi. J'ai aussi une grande facilité d'adaptation car, je n'ai pas toujours chanté que du flamenco, heureusement d'ailleurs. J'ai un esprit un peu plus ouvert. Et puis, contrairement à certains, je ne me revendique pas exclusivement flamenca. Je suis du côté maternel, issue d'une famille de joteros, respectés dans la région (folklore de Navarra) et dès mon plus jeune âge, en espagne, je chantais dans les peñas, dans les concours, les églises. Je chantais des jotas et aussi du folklore latinoaméricain au grand désespoir de mon père qui lui souhaitait me voir chanter davantage de flamenco (il est d'origine gitane, de Grenade). A quinze ans, avec une bande de potes, on a créée un groupe où nous reprenions des chansons de Bob Marley, et des compos personnelles... Alors tu vois!

Comme tu as pu t'en rendre compte rythmiquement sur un morceau on passe du quatre temps, au sept, ensuite au neuf et puis un peu au quinze... enfin pas facile pour nous les flamencos... On a dû aussi faire un effort de mémorisation dû aux changements rythmiques dans un même morceau et au changement d'ambiance aussi. Ca pour Gonzalo et moi, c'était du jamais vu. Mais rassure-toi nos parties flamencas sont aussi compliquées pour les autres musiciens d'Arbols... Avec Laurent, Gonzalo et moi avons travaillé sur les chansons, à savoir les rythmes flamencos que nous allions adopter... Laurent ne vient pas du milieu flamenco donc nous avons mis notre grain de sel. C'est un plaisir de travailler avec ce mec. Gonzalo comme moi d'ailleurs avons mis du temps à nous y faire mais je commence à rentrer dans son univers musical et poétique, presque enfantin. D'ailleurs, c'est un disque où tu peux faire marcher ton imaginaire à fond la caisse... Ca plaît follement aux enfants tu sais, je confirme pas qu'au mien mais à tous ceux qui ont écouté le disque... Laurent a beaucoup travaillé avec les enfants et lui même a un imaginaire très enfantin, très imaginé. C'est ça que j'aime bien chez lui. J'aime les gens qui gardent leur âme d'enfant. On s'entend tous très bien, j'ai une petite préférence pour mon ami Iviza Bogdanic, l'accordéoniste du groupe mais ça c'est normal. J'adore l'accordéon, instrument que je pratique et grâce à un ami serbe tzigane de la famille, j'ai été baignée très tôt dans l'univers de la musique tzigane et celle des Balkans.

4. Aurélia, on te voit généralement dans un registre plus traditionnel et tu n'as rejoint la formation que récemment. Comment es-tu parvenue à t'adapter aussi rapidement ?

Je me suis adaptée rapidement parce que j'aime cet univers. Impulsive, je m'y suis laissée absorber sans y opposer de résistance tout en mettant de côté mes automatismes . Ainsi disponible, J'ai pu m'intégrer dans cette fusion en écoutant et répétant beaucoup, ma technique flamenco se mettant au service du répertoire du tabla indien, de la poésie des textes et du rythme, dans ce qu'il a d'universel. Ils nous reste encore beaucoup à découvrir dans cette aventure.

Aurélia, tour à tour en rouge et noir, jouant avec un manton puis un voile écru, lumineuse dans sa tenue rouge flamboyante a tout donné sur scène vendredi et fut acclamée, avec les musiciens, par le public ravi.

5. Que vous apporte à tous cette expérience ?

Cette expérience nous apporte le plaisir de jouer et d'offrir au public un voyage musical varié. Cette musique entre tension et relachement, exaltation et interiorité nous pousse à rester créatif à chaque changement de rythme ou pulsation. Nous nous enrichissons mutuellement de part les univers traditionnels dont nous sommes issus.

Merci à tous pour le temps que vous avez consacré à cette interview, à noter que le prochain concert d'Arbols aura lieu le 10 Mars.

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flamenco-culture.com - Murielle Timsit - Le 07/03/2007